lundi 28 novembre 2005
AFP 27.11.05 | Le professeur Jean-Pierre Machelon, président de la
Commission de réflexion juridique sur les relations des cultes avec les
pouvoirs publics qui vient d’entamer ses travaux, pense que la législation
en vigueur peut être aménagée car le statu quo ne satisfait complètement
aucun culte. "Tous les cultes ont des motifs plus ou moins graves
d’être insatisfaits du statu quo", a déclaré à l’AFP M.
Machelon, professeur de droit public à l’université René
Descartes-Paris V et directeur d’études à l’Ecole pratique des
hautes études. "Le culte aujourd’hui n’est pas le culte de
1905 : les temps ont changé et il n’est pas absurde de vouloir éviter
un décalage entre le droit et la réalité sociale". "La législation
sur les cultes est un ensemble extrêmement complexe, il y a donc de
l’espace pour une réflexion juridique constructive, dans le respect
de la laïcité", estime-t-il. Mais "l’essentiel de la loi
de 1905 doit être respecté, il ne s’agit pas de bouleverser les équilibres
auxquels tout le monde tient, simplement d’aménager le cadre
juridique pour permettre de régler les problèmes
d’aujourd’hui".
La Commission, qui a pour rapporteur Laurence Marion, auditeur au
Conseil d’Etat, a eu sa première réunion de travail vendredi en présence
de tous ses membres. Le prochain rendez-vous est fixé au 8 décembre,
veille du centenaire de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et
de l’Etat. M. Machelon entend faire travailler la Commission "à
un rythme soutenu" afin de pouvoir remettre son rapport en juin au
ministre de l’Intérieur chargé des cultes, Nicolas Sarkozy.
Les auditions débuteront en janvier et "ne seront pas
publiques", précise-t-il. En annonçant la composition de la
Commission la semaine dernière, le ministère avait précisé qu’elle
entendrait "les représentants des grandes religions de France et
toutes les personnes (élus, responsables associatifs, hauts
fonctionnaires, universitaires) dont l’audition lui semblera nécessaire".
Les membres de la Commission sont pour la plupart avocats, professeurs
de droit ou membres du Conseil d’Etat. Nommés à titre individuel,
ils reflètent également les grandes sensibilités religieuses en
France.
Des mouvements souvent considérés comme sectaires en France, comme
les Témoins de Jéhovah, en sont absents mais "il y a des sujets
qui ne peuvent être évités et ils ne seront pas évités", dit
M. Machelon, précisant que "le droit français ne peut être abordé
en faisant abstraction de la jurisprudence de la Cour européenne des
droits de l’Homme". "Nous avons à proposer des solutions
juridiques à des problèmes juridiques qu’il nous revient
d’identifier avec précision et nous n’avons pas à craindre de
proposer des modifications des lois et règlements", insiste
M.Machelon, soulignant que la loi de 1905 a déjà été modifiée dix
fois depuis sa promulgation. Selon lui, "la loi de 1905 n’est pas
claire sur tous les points et comprend des dispositions
contradictoires".Ainsi, l’article 2 dispose que la République ne
reconnaît aucun culte mais "cela ne veut pas dire qu’elle ne
connaît pas les cultes : elle y est bien obligée pour leur garantir le
libre exercice exigé par l’article 1, garantie qui implique des
actions positives". "Ces contradictions n’ont fait que se développer
du fait de l’augmentation des subventionnements indirects au XXe siècle",
poursuit-il. "Aujourd’hui, les termes de la loi sont interprétés
d’une façon qui n’était pas évidente à l’époque de sa
promulgation".
Sectes et laïcité
mercredi 14 décembre 2005
Après le
financement des mosquées et des centres de formation des imams, le
financement des sectes ?
M. Sarkozy a fait du chemin depuis son discours lénifiant à l'Académie
des sciences morales et politiques, le 19 septembre 2005 ! À cette époque,
le locataire de la place Beauvau parlait, à propos de la loi 1905,
"d'un bon texte, un texte fondateur, un texte important, un texte
solide". Tellement solide, qu'il supporterait facilement un énième
"toilettage" !
Désormais, avec sa "Commission de réflexion juridique sur les
relations des cultes avec les pouvoirs publics", le ministre de
l'Intérieur donne l'impression d'avoir effectué un inquiétant
glissement linguistique. Voici un petit florilège des litotes de son
alter ego, M. Machelon, président (nommé par M. Sarkozy) de ladite
commission : "Tous les cultes ont des motifs plus ou moins graves
d'être insatisfaits du statu quo" (de la loi 1905). Le professeur
de droit public a par ailleurs cru bon de préciser "qu'il y a des
sujets qui ne peuvent être évités, et ils ne seront pas évités"
(déclarations faites à l'AFP, le 27 novembre dernier).
L'UNADFI (l'Union nationale des associations de défense des familles
et des individus, déclarée d'utilité publique, lutte contre les
sectes) s'en est émue car, par "cultes" ou "sujets"
("qui ne peuvent être évités"...), il faut comprendre
"mouvements sectaires". Le communiqué de presse de l'UNADFI
daté du 5 décembre 2005, et mis en ligne le 6, commence ainsi :
"L'UNADFI s'interroge sur la déclaration de la Commission de réflexion
juridique sur les relations des cultes avec les pouvoirs publics (AFP
27/11/05), qui semble s'étonner que des MOUVEMENTS CONSIDÉRÉS COMME
SECTAIRES EN FRANCE... NE SOIENT PAS AUDITIONNÉS."
Bien que J.P. Machelon ait affirmé que "l"essentiel de la
loi de 1905 doit être respecté", il y a de quoi s'interroger, en
effet, sur cette commission, qui devra faire des "propositions opérationnelles"
( ?) au ministre chargé des cultes, en juin 2006.
En fait de "toilettage", ne s'agirait-il pas plutôt d'un
"nettoyage au karcher", auquel M. Sarkozy voudrait se livrer ?
Aussi lui fixons-nous rendez-vous, en juin 2006 !
Article rédigé par Gérard, Henri PERTUSA
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=5324