Communiqué de presse du Centre d'Information et de Conseil des Nouvelles Spiritualités (CICNS)

Les « reclus de Monflanquin » ou le chaos médiatique

Montpezat de Quercy - - 19/11/2009 - 14h (CICNS) - L’affaire Thierry Tilly (ou des « reclus de Monflanquin »), comme la plupart des affaires rangées dans la catégorie « sectes », est une nouvelle illustration d’un aveuglement collectif, relayé et alimenté par la plupart des médias classiques. Au-delà des délits éventuels et qui, pour la plupart, restent à prouver, c'est bien le traitement médiatique de ce sujet de société qui est en question.

On peut lire dans « Le Monde » du 18 novembre 2009, par exemple, qu’il s’agirait d’une affaire de secte parce que des personnes majeures (depuis de nombreuses années) n’ont plus de lien avec leur environnement familial habituel.

Devant l’impossibilité objective, rationnelle et légale de leur reprocher quoi que ce soit, en l'état actuel des enquêtes, on parle de « prison virtuelle » (il n’y a pas de prison), de « disparition » (il semble que l'on sache où ces personnes se trouvent, puisqu'elles sont dites recluses), de « secte » (il n’y a pas de cadre sectaire dans le sens habituel utilisé par le courant antisectes), de « manipulation mentale » (personne n’a porté plainte parmi les personnes concernées), la perle venant de Me Picotin, avocat des plaignants (ces derniers sont les membres de la famille qui ne voient plus leurs proches, ce qu’une démocratie rend tout à fait possible et légal), qui se déclare désarmé devant des « gens manipulés » (c’est son interprétation de la situation, jusqu’à preuve du contraire), l’article soulignant un peu plus loin qu’ils ont en fait « tout leur esprit », sans y voir de contradiction ou alors en prenant le lecteur pour un imbécile.

Cet article, loin d’être unique dans son genre (une émission de télévision a rassemblé plusieurs millions de téléspectateurs sur le sujet, l’autre soir, récupérant les mêmes idées reçues, les mêmes diffamations), se termine même par cette figure d’oxymore qui n’est qu’une pirouette sémantique devenue classique dans une  lutte antisectes qui tente de brouiller les pistes d'une véritable réflexion : « la soumission librement consentie ».

Résumons : nous avons affaire à un groupe de personnes majeures qui ont fait un choix de vie mais que des proches soupçonnent de ne pas l’avoir fait de leur plein gré, mais tout en l’ayant consenti librement, qui seraient en prison, mais que personne ne retient de quitter l’endroit où elles se trouvent, qui seraient dans une secte, mais sans qu’il y ait une croyance quelconque à la clé, qui seraient manipulées mentalement, mais en ayant « tout leur esprit ».

Au CICNS, nous classons ce genre d’article affligeant parmi les perles de la lutte antisectes à la française, qui a, historiquement, toujours été le véritable chantre de l’irrationnel en invoquant successivement les envoûtements, l’hypnose, la folie ou la manipulation mentale chaque fois qu’elle était confrontée à des choix de vie ou des phénomènes qu’elle était incapable de comprendre ou d’analyser avec intelligence.

Comme le soulignait magistralement Arnaud Esquerre, sociologue, dans son ouvrage sur la manipulation mentale, en France, être libre, c’est « avoir les bonnes soumissions ». 

Contact : Service Presse du CICNS - Denis Mathieu - 06 34 11 49 58 - Presse@cicns.net - http://www.cicns.net    Tous les communiqués de Presse du CICNS

 

15h 47, le jour-même, une agence de Presse réagit laconiquement à notre communiqué :

Et qu’en est-il de l’argent ?

Notre réponse :

Bonjour,


Nous devons reconnaître, pour l'argent comme pour tous les autres éléments de ce dossier que nous avons énumérés, que nous ne disposons de rien de probant pour l'instant pour tirer des conclusions, que nous sommes dans une démocratie, dont les médias comme les militants antisectes devraient défendre les principes, en s'élevant contre les amalgames et le déclin des libertés individuelles. En démocratie, un individu a même le droit de faire des erreurs et ni l'État, ni les médias, ne sont habilités à lui demander de changer de vie.


Si vous souhaitez vraiment parler de problèmes d'argent, laissez les communautés en paix, et traitez la question du gaspillage et des abus monumentaux que personne ne remet en question au niveau d'instances internationales et de notre propre gouvernement (vous avez entendu parler de la moquette éphémère achetée par M. Sarkozy à 90 000 € ?). Il est temps de cesser de détourner le regard des problèmes de là où ils sont en développant pendant des semaines des histoires pour endormir les consciences. Cordialement.
 

Autre commentaire d’un journaliste, le 21 novembre (extraits pour conserver l'anonymat) :

(…) Je relève que vous faites peu de cas des actes de tortures dont il est aussi question dans ce dossier. Tortures dénoncées par la victime mais également par deux autres personnes qui ont - si je comprends bien votre analyse - pendant huit ans, en conscience et par pure générosité, livrées leurs biens à M. Tilly. Puis sont livrés à des actes qualifiés de barbaries par le code pénal sur un e personne au motif qu'elle détenait le secret de "l'accès au magot" qu'elle ne voulait pas livrer. Sept jours assises sur un tabouret, sans dormir, sans avoir droit de se lever ne serait-ce que pour quelques besoins intimes... Peut-être faut-il y voir cette liberté dont vous parlez et qui permettrait à chaque individu de faire exactement ce qu'il entend, sans qu'aucune loi ne s'avise à limiter ses actes – quels qu'ils fussent - afin de protéger les personnes qui pourraient en avoir besoin.

Notre réponse au 21 novembre :

(...) La question est justement de savoir si les "actes de barbarie" ont été, au moment où les médias jouent les Juges, reconnus comme tels par la Justice ou s'il s'agit d'une spéculation, d'un emportement émotionnel. C'est probablement cette habitude de confondre les rôles qui permet aux médias de présenter comme "vérité" des faits qui ne sont pas élucidés.

D'autre part, notre communiqué ne se focalisait pas sur les délits eux-mêmes, comme nous le soulignons dans son premier paragraphe, mais sur l'avalanche d'amalgames, de lieux communs et de raccourcis en vogue ("secte", "gourou") qui accompagnent cette enquête.

Vous devez avoir conscience qu'une remise en question profonde des usages des grands médias est inévitable et que le sujet desdites "sectes" est un exemple criant de cette urgence. Nous sommes bien placés pour savoir que certains articles de journaux ont été une véritable torture pour des personnes qui n'avaient rien d'autre à se reprocher que d’avoir fait un choix de vie différent.

Pour mieux comprendre ce dont nous parlons, nous vous invitons à visionner notre film documentaire en trois parties :  Partie 1, Partie 2 et Partie 3. La partie 3 traitant plus particulièrement la question des médias.

Cordialement, 

 

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