Communiqué de presse du Centre d'Information et de Conseil des Nouvelles Spiritualités (CICNS)

Les candidats à la présidentielle, les sectes et la spiritualité     

Montpezat de Quercy - 08/04/2007 - 18h00 (CICNS) - La politique de la France à l'égard des nouvelles spiritualités fait exception au sein des pays démocratiques. Et si l'action de l'État est légitime en termes de prévention et de mise en application du droit pour faire respecter l'ordre public, elle ne peut cependant en aucune manière justifier les campagnes de dénigrement dont les nouvelles spiritualités sont l'objet depuis plus de 25 ans.

Afin de répondre aux interrogations de centaines de milliers d'électeurs ayant adopté une démarche alternative spirituelle, éducative ou thérapeutique, le CICNS a réuni des éléments d'information sur le regard porté par les candidats à la présidence de la République sur la question de la spiritualité, de la laïcité et des sectes en France.

Nicolas Sarkozy : Le candidat de l'UMP est prolixe sur le sujet : " Je suis fier d'être l'enfant d'un pays où la conscience est libre (…) Si je suis élu (…), je veux être le président qui réconcilie les religions et la laïcité, et les croyants avec les laïques (…).Je veux aller parler à ceux qui se disent victimes de discrimination. (…) Je veux une démocratie irréprochable (...) où les libertés individuelles soient respectées..." Il incite les autres politiques à ne pas se contenter de parler " d'économie, de social, d'environnement, de sécurité" et d' " aborder les questions spirituelles ". " La dimension morale est plus solide, plus enracinée, lorsqu'elle procède d'une démarche spirituelle, religieuse, plutôt que lorsqu'elle cherche sa source dans le débat politique ou dans le modèle républicain ". Cette spiritualité s'apparente-t-elle, dans son esprit, à celle de Georges Bush ou du Mahatma Gandhi ?

Ségolène Royal : Le parti socialiste semble le plus hostile aux minorités spirituelles. C'est à l'arrivée du pouvoir socialiste, en 1981 que les minorités spirituelles ont pris conscience d'une nouvelle répression à leur encontre. Ségolène Royal est à l'origine d'un " plan contre les sectes " présenté en 1999 aux inspecteurs d'académie. Elle y reprend les poncifs antisectes habituels. Les interrogations du CICNS proposées sur " Désirs d'avenir ", le forum de Ségolène Royal, n'ont pas été publiées. Et le choix d'Arnaud Montebourg, ancien avocat de l'ADFI - en particulier dans l'affaire Paturel - comme porte-parole ne présage pas d'une grande ouverture vers les minorités spirituelles. Elle s'est exceptionnellement exprimée sur la question religieuse à la demande du magazine La Vie (5 avril 2007): " (...) Il ne peut pas y avoir d'interférence entre les convictions religieuses et les affaires publiques. L'Etat doit garantir la liberté de culte, lorsqu'elle est pratiquée dans le respect des lois de la République. (…) ".

François Bayrou : Extraits d'interviews : " Comme homme, je suis croyant, catholique et pratiquant. Comme citoyen, je suis un défenseur de la laïcité. (...) Nous sommes une société héritière des valeurs chrétiennes aussi bien que des lumières. Ces valeurs ouvrent sur l'autre. La vision de l'homme qu'elles portent n'est pas intégriste, elle n'exclut personne. Et nous devons être fiers de cet héritage spirituel. Il n'y a aucune raison d'accepter que les chrétiens soient brocardés, pas plus qu'aucune autre religion ou philosophie. " " Début des années 1970, j'ai 18 ans et je suis fasciné par Gandhi et son disciple français Lanza del Vasto ". M. Bayrou n'était pas à proprement parler membre de la communauté mais il dirigeait " Les amis de l'Arche " (Source : Le Point, 1 juin 2006). Le candidat a également été initié à la philosophie indienne par son professeur au lycée de Nay, Jean Biès. François Bayrou écrit dans son livre, Le droit au sens : " Le mal de notre temps est un mal de l'âme ". D'après lui, à force de consommation et de matérialisme, les gens ont oublié de donner un sens à la vie. " Le cap, je le répète, c'est l'humanisme, l'éducation des enfants, la culture, les valeurs de générosité, de spiritualité. Les sociétés qui succombent au matérialisme sont des sociétés mortes. " L'argument de François Bayrou pour les présidentielles ? " Je veux prendre ce pays et le rendre heureux ! " Sur une page de son site, le candidat se laisse aller à un petit couplet démagogique sur " les sectes " ; peut-être un passage obligé pour être dans l'air du temps ? De même, en réponse à un questionnaire envoyé par le CICNS, François Bayrou calque les poncifs de la campagne anti-sectes. Il est cependant le seul des quatre premiers candidats dans les sondages à avoir répondu au courrier du CICNS, ce qui compense à nos yeux la faiblesse de sa réponse.

Jean-Marie Le Pen : Des liens existent entre Jean-Marie Le Pen et les groupes nationalistes Chrétienté-Solidarité et Elus catholiques patriotes. Les thèses de l'extrême-droite ont cependant provoqué des réactions des églises catholique et protestante. En 1985, le Cardinal Lecourtray a déclaré qu'elles étaient incompatibles avec l'Evangile et les valeurs chrétiennes. Sur le site du Front National : " Il n'est que temps de réintroduire le Sacré dans notre société. On voit bien que nos contemporains n'ont pas faim que de pain. A des degrés divers, la percée des sectes comme l'usage massif de tranquillisants par nos compatriotes, en sont les contre-preuves. La sécularisation progressive des sociétés occidentales depuis le XVIe siècle, sécularisation qu'elles ont exportée dans le reste du monde, porte une très lourde responsabilité dans le " désenchantement du monde moderne " (expression de Max Weber, économiste et sociologue allemand) (...) Aucune société ne peut durablement faire l'économie du Sacré qui est, par définition, la vraie différence. Le monde a besoin, pour ne pas s'enfoncer dans des ténèbres sans retour, que soit gardée, vivante et ferme, la mémoire de l'Incarnation (...) Il est de la responsabilité du chef de l'État de ne pas désacraliser la vie publique. " Le Front National exprime incidemment son point de vue sur les sectes lors d'un article de Marine le Pen au sujet du " financement public de l'Islam " : " (...) Comment l'Etat refusera demain à la multitude de sectes, aux Scientologues, aux Témoins de Jéhovah comme aux admirateurs de Gilbert Bourdin, le génie cosmoplanétaire, les subventions publiques accordées avec largesse aux Mahométans ? Sauf à choisir là encore les religions autorisées et celles qui ne le seraient pas. Face à ces menées, le Front National est le seul à s'opposer vraiment. Dans ce combat vital pour l'identité française, il porte une responsabilité historique. "

Dominique Voynet : participe à la fondation des Verts en 1984. Un franc parler, peu de langue de bois, lui confère une bonne image. Rien n'est mentionné sur la laïcité ou la religion dans son programme. La candidate représente une tendance située " à gauche " et n'est pas en faveur de la protection des minorités spirituelles. Extraits de ses réponses au magazine La Vie, numéro 3214 : (...) Les religions aident sans doute les croyants à conduire leur vie (...) Elles ont été souvent utilisées pour assurer la résignation des opprimés à l'ordre établi. (...) Je suis athée et je ne me sens proche d'aucune religion. (...) L'Etat doit garantir la liberté de conscience, et de croyance, et assurer la liberté de pratiquer une religion, ou de n'en pratiquer aucune. La candidate des Verts n'a pas répondu aux courriers du CICNS.

Frédéric Nihous : Membre du bureau et du parti Chasse Pêche Nature Traditions. Dans son programme est affichée la volonté de lutter contre " l'intégrisme écologique " : " l'idolâtrie contemplative et sectaire qui anime les partis ou associations écologistes extrêmes " et " On ne peut pas continuer à subir l'écologie de l'absurde (qui veut) tout gérer en privilégiant l'animal à l'homme, (...) Le bien-être animal, soit, mais pas au détriment du bien-être humain ! " Le candidat se dit " athée et très attaché à la loi de 1905 et tout ce qui permet de séparer l'Etat des religions (...)" (La Vie, 5 avril 2007)

Gérard Schivardi : Candidat des maires de France, soutenu par le Parti des Travailleurs, Gérard Schivardi déclare : " Nous réclamons l'abrogation des lois anti-laïques (...) Nous réclamons que l'argent de la République soit réservé à l'école de la République : " Fonds publics à l'école publique, fonds privés à l'école privée " (Depuis 2004, les communes contribuent à la scolarisation d'un élève en école privée comme pour un élève en école publique). " Si Dieu existe, qu'aimeriez-vous lui dire ? ", lui demande le magazine La Vie. Sa réponse : " Qu'il ne se mêle pas des affaires des hommes et qu'il demande à ses ouailles de respecter la liberté de conscience de chacun. Mais comme il n'existe pas, cela restera un vœu pieux. " (5 avril 2007).

Arlette Laguiller : Force Ouvrière subit souvent l'appellation de " secte ". Est-ce à cause de ce label utilisé contre eux (et du fait que Robert Garcia, un des fondateurs, y exerce une grande influence et a hérité du qualificatif de " gourou ") ? Toujours est-il que le thème des sectes n'est pas présent dans les discours ou programmes d'Arlette Laguiller. La candidate trotskiste a même porté plainte au sujet de cette utilisation du mot " secte " à leur encontre. Il reste que son indifférence pour la question que soulève le CICNS est totale. Elle n'a pas souhaité répondre aux questions du magazine La Vie sur la religion.

Marie-Georges Buffet : En réponse à une personne la questionnant au sujet des sectes : " Le phénomène sectaire, extrêmement dangereux - qu'il s'agisse de l'Église de Scientologie que vous évoquez et de ses organisations " satellites " ou de toutes celles qui existent partout dans le monde - doit être combattu fermement. Ce sujet fait l'objet depuis plusieurs années d'un important travail parlementaire, dans lequel mon collègue député Jean-Pierre Brard, élu de mon groupe à l'Assemblée nationale, comme moi-même farouchement opposé aux sectes, s'est beaucoup investi. Ce travail a permis des avancées importantes. Mais il reste encore beaucoup à faire et je suis convaincue qu'il faut poursuivre et intensifier la lutte dans ce domaine. Le droit pénal français comporte de nombreuses dispositions permettant de sanctionner les dérives sectaires. Il est nécessaire d'utiliser à plein tout cet arsenal juridique pour contrer l'action des sectes, pour en condamner les responsables et pour prononcer leur dissolution. "

" J'ai été élevée dans un milieu catholique mais je me sens proche de tous ceux et de toutes celles qui ont la dignité de chaque homme et de chaque femme au cœur, sans distinction de religion. Et je suis sans complaisance à l'égard de tous les intégrismes. (...) Je ne crois pas que l'on puisse séparer sphère privée et sphère publique. La laïcité ne doit pas consister en une séparation factice, voire schizophrène, entre l'espace public et l'espace privé... Croire n'est pas tabou. " " Si Dieu existe, qu'aimeriez-vous lui dire ? " " Sans doute comme beaucoup de croyants : que j'aurais aimé un peu plus le rencontrer. " (La Vie, 5 avril 2007)

Olivier Besancenot : La LCR partage avec les minorités spirituelles le " privilège " d'avoir parfois été appelée " une secte ". Malgré cette utilisation infâmante, ce groupe politique étant très " à gauche ", il est, pour le moins, indifférent au sort des nouvelles spiritualités en France. Il n'hésite pas à l'occasion à rendre la pareille à d'autres groupes, comme il l'a fait avec " nouvelle solidarité " à Vitry qu'il a qualifié de "mouvement sectaire " (Le Parisien Val-de-Marne, 27 septembre 2004) Leur manifeste souligne très clairement le soutien à une école strictement laïque. Il dit également : " (La LCR veut) conquérir une liberté fondamentale : ne plus être dans l'obligation de croire au ciel pour construire son bonheur sur terre. "

Paroles de M. Besancenot : " (...) Pour ma part, je distingue d'un côté la religion institutionnalisée, dont les apports sont rarement positifs, de la croyance et de la pratique religieuse en général. Ces dernières peuvent susciter une vision conservatrice de la société, mais aussi être à l'origine d'un engagement progressiste, solidaire, humain. (...) Sur la laïcité " à la française ", mon jugement est nuancé. Je la juge positive dans la mesure où elle permet aux religions de s'exercer librement, sans influencer la sphère publique. Mais elle demeure ambiguë lorsqu'elle prétend que l'Etat est neutre, alors qu'il est toujours dominé par l'idéologie dominante. (...) De quelle religion vous sentez-vous le plus proche ? Pratiquez-vous ? ....je me suis fixé pour règle de ne pas communiquer sur ce qui touche à ma sphère privée. " (La Vie, 5 avril 2007)

José Bové : José Bové a un parler franc, il est défini comme " altermondialiste " et, à cet égard, imagine donc un " autre monde ". Il dit combattre "pour le rassemblement de toutes les forces de la gauche de transformation sociale, solidaire, écologiste, antiraciste et féministe". Il n'a jamais été question de spiritualité ou de médecines alternatives dans son discours, à notre connaissance. " (...) De par ma tradition familiale, je me sens proche du christianisme. Mais, aujourd'hui, je me retrouve plutôt sur une conception agnostique. (...) Mon sage de référence demeure l'apôtre indien de la non-violence, le Mahatma Gandhi. En partant de sa propre culture et de la religion hindoue, il a réussi à intégrer ce qui permet à l'humanité d'avancer dans les autres traditions. " (La Vie, 4 avril 2007) Dans son programme est inscrit la " création d'une charte de la laïcité dans la déclaration des droits de la VI république pour que soit respectés les principes républicains dans tous les lieux publics ". Cette expression vise à limiter l'expression démocratique de la foi à la " sphère privée ".

Philippe de Villiers : Comme Jean-Marie Le Pen, le candidat appuie sa foi religieuse sur le courant catholique traditionaliste. Interrogé sur la place de la religion dans la société, Philippe de Villiers répond : " On n'ose plus dire que la France est un pays judéo-chrétien. La place du christianisme doit être à la mesure de ce qu'il a fondé dans les principes de notre édifice juridique et éthique, qu'il s'agisse de notre conception de l'être humain ou de la famille. Une société qui oublierait ses racines se projetterait dans le vide. (...) Il serait absurde de réduire la religion à un espace privé sans influence sur la société. Ce serait nier le rôle de la doctrine sociale de l'Église qui, d'encycliques en encycliques, a porté un certain nombre de messages (...) Dans une perspective si exclusivement catholique, il ne semble pas rester beaucoup de place pour la défense des minorités spirituelles et la liberté de conscience dans son programme.

Vous trouverez le questionnaire envoyé par le CICNS à tous les candidats officiels sur http://www.cicns.net/Declaration_Engagement.htm.

Le CICNS présente les candidats sous l'angle exclusif de leur relation à la spiritualité et à la question des minorités spirituelles en France. Nous reconnaissons qu'ils peuvent avoir des compétences éventuelles dans d'autres domaines qui pourront être prises en compte au moment de l'élection. Notre regard n'est pas partisan et nous nous efforçons de présenter des faits et non des jugements affectifs.

Contact : Service Presse du CICNS - Valérie Dole - 06 34 11 49 58 - Presse@cicns.net - http://www.cicns.net

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