De l'homosexualité aux sectes : Fléaux, répression d'État, mémoire courte et Histoire en boucle

CICNS (septembre 2011)

Le 18 juillet 1960, l’amendement Mirguet, classant l’homosexualité parmi les « fléaux sociaux » au même rang que l’alcoolisme, la tuberculose, la toxicomanie, le proxénétisme et la prostitution, est adopté par l’Assemblée nationale.

Le 30 juillet, la loi n° 60-773 autorise le gouvernement à prendre,  « par application de l'article 38 de la Constitution », les mesures nécessaires pour lutter contre « certains fléaux sociaux ».

Il s’est ensuivi une répression officielle de l’homosexualité qui ne prendra fin qu’en 1981, quand furent supprimés les groupes policiers de contrôle des homosexuels et les fichiers les concernant et que le Ministère de la Santé retira l’homosexualité de sa liste des maladies mentales.

Il y a fort à parier que peu aujourd’hui connaissent cet épisode récent de répression discriminatoire officielle de l’État français. 

Cet « oubli social » peut se mesurer à l’incrédulité que nous rencontrons lorsque nous parlons de la répression aujourd’hui à l’œuvre sous couvert de « lutte contre les dérives sectaires » et utilisant les mêmes ressorts : l’idée d’un « fléau social »[1] mais aussi d’une « pathologie », pour reprendre le terme employé en 2004 par Nicole Guedj, alors Secrétaire d’État aux droits des victimes auprès du Garde des Sceaux, dans son discours d’ouverture du colloque « L’avocat face aux dérives sectaires ».

Pathologie qui serait contractée par manipulation mentale (des « gourous ») sur des personnes en état de faiblesse (des « adeptes ») que l’on envisage de traiter avec ou sans leur consentement, puisque cette exception notable au droit des personnes est prévue dés lors qu’il y a « maladie mentale ».

L’Histoire nous rappelle notamment, à condition qu’elle soit enseignée dans l’intention de révéler autant les forces que les faiblesses, que toute société, face à ses peurs, est prompte à créer de nouveaux boucs-émissaires, à concevoir des exceptions à ses propres grandes déclarations humanistes, à réintroduire l’arbitraire dans ses codes et à vouloir « guérir » les « déviants »… pour finir par exprimer des excuses officielles, des décennies plus tard, voire une honte de façade pour avoir fait de tels choix.  



[1] Le rapport parlementaire Gest-Guyard de 1995 assimile (textuellement) les sectes à un « fléau » et sera immédiatement suivi de la création de la première institution interministérielle dédiée à l’étude et la lutte contre les « sectes » 

 

 

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