Courriers au gouvernement au sujet de la réapparition du deprogramming en France

Lettres adressées au Ministre de la Santé, au Ministre de l'Intérieur (et copie à la MIVILUDES) à la suite de l'annonce faite par Me Picotin, avocat, sur la création d'une cellule d'exit counseling en Aquitaine. L'exit counseling est présenté comme une forme améliorée d'une méthode pour extraire par la force des membres d'une minorité spirituelle, interdite aux États-Unis dans les années 1980, appelée "Deprogramming". La controverse autour de ces méthodes n'est pas éteinte, car les noms et les formes de cette méthode pour contraindre des individus à renier leurs croyances continuent à changer à la suite de dérives. La tentative « d'exfiltration », initiative privée de Me Picotin et son équipe, des « reclus de Monflanquin » en Angleterre illustre bien cette volonté de « sortir le membre de son groupe » contre sa volonté, et avant même d'avoir parlé avec lui. L'exit counseling, à notre sens, ne représente qu'une forme extrême de l'intolérance et de la répression aveugle manifestées par l'antisectarisme primaire de notre époque. Ces courriers sont restés sans réponse à ce jour (avril 2011). 

À l'attention de MM. les ministres de l'Intérieur et de la Santé

Montpezat de Quercy, le 1 décembre 2009

Objet : Inquiétudes au sujet des méthodes dites : Exit Counseling, Thought Reform Consulting et Deprogramming en France

Réf : cicns/EC/n°1

Monsieur le Ministre,

L’affaire dite des « reclus de Monflanquin » a agité le monde médiatique depuis plusieurs semaines. Notre association (Centre d’Information et de Conseil des Nouvelles Spiritualités), qui œuvre à équilibrer le débat sur la lutte contre les dérives sectaires depuis près de 6 ans, a relevé les habituelles exagérations et diffamations de la part des médias.

Mais nous vous contactons plus particulièrement au sujet d’une information qui s’est glissée au milieu de l’avalanche des dépêches et des interviews et qui suscite notre vive inquiétude.

Me Picotin, avocat des parties civiles dans cette affaire, a révélé au cours de son excursion en Angleterre, qu’il avait créé en Aquitaine une « équipe d’exit counselors » pour aider des membres à sortir d’un groupe jugé sectaire (même si ces personnes n’ont rien demandé). Vous connaissez peut-être le passé houleux des pratiques de deprogramming aux États-Unis et en France qui ont pris tour à tour les noms de « exit counseling » puis, plus récemment, « thougt reform consultation ». Nous vous invitons à lire notre dossier sur le sujet (Document A : Deprogramming) ainsi que notre récent communiqué (Document B : Communiqué) .

Ces pratiques, peu encadrées mais souvent tolérées parce qu’elles semblent convenir à des membres de familles désemparés, sont en contradiction totale avec les directives actuelles concernant l’encadrement des psychothérapies en France qui exigent que tous les psychothérapeutes soient qualifiés. En effet, si dans le passé (années 1970-1980), le deprogramming était le fait de véritables gangsters (enlèvements, violence, harcèlement), dont certains ont subi des peines de prisons, les méthodes d’exit counseling, présentées comme une amélioration ensuite, sont de l’aveu même de leurs promoteurs, souvent pratiquées par des personnes sans aucune formation, sinon leur implication personnelle et souvent passionnée dans la lutte antisectes (ce qui est le cas de Me Picotin, à notre connaissance). Nous avons eu l'occasion, dans une autre affaire, de mettre en lumière le cas de parents qui ont séquestré leur fille et lui ont administré des médicaments de force pour lui faire renier ses croyances. Leur témoignage avait été présenté en 2007 lors d’une émission télévisée (Document C : Télévision) .

Nous demandons que le jour soit fait sur l’organisme d’exit counseling fondé en Aquitaine par Me Picotin (et ses associés, dont les noms ont été curieusement gardés secrets lors de leur tentative « d'exfiltration des membres de ce groupe à Oxford) ainsi que sur tout autre organisme avec les mêmes objectifs. Nous vous remercions donc de nous faire connaître les informations dont vous disposez à ce sujet, et le cadre juridique existant pour ces pratiques qui se développent dans l’ombre. Les minorités spirituelles françaises sont en droit de savoir si le gouvernement soutient ces méthodes, si elles sont donc officielles ou représentent une activité marginale et non reconnue.

Dans l’attente de votre réponse, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Ministre, l’expression de notre très haute considération. 

 

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